[Critique] Endorphine – Glaciale distance

Distant et cérébral, Endorphine avance bien quelques explications techniques pour donner un sens concret à son intrigue décousue. Plongé dans une ambiance glaciale et impersonnelle, le film d’André Turpin peine toutefois à transmettre toute la complexité de son sujet.

Image de la comédienne Mylène Mackay dans le rôle de Simone marche de dos dans la ruelle - Endorphine

Simone marche de dos dans la ruelle – Endorphine (Image Josée Deshaies)

La première phrase du film nous alerte. En voix off, Lise Roy (Simone à 60 ans) nous prévient que nous sommes en plein rêve – celui du cinéaste, ou le nôtre ? – et installe ainsi une incommunicabilité qui sera présente durant tout le film. Car en dehors de quelques explications d’ordre technique que nous livre parcimonieusement Simone de 60 ans, face à un auditoire attentif, Turpin se garde bien de donner les clés au spectateur. Charge à ce dernier d’assembler – ou non – les pointillés temporels constituant les trois époques dans la vie de Simone, une femme ayant assisté au meurtre brutal de sa mère.

Imbrication d’histoires déconstruites ou fable absconse se basant sur notre rapport aux mystères de la science, Endorphine offre, à l’instar des Mondes possibles de Robert Lepage, un sujet accessible uniquement par le biais de l’imaginaire et du prolongement que l’on fera du film après la projection. André Turpin nous pose plusieurs questions sur notre rapport au temps, à la douleur et sa réminiscence et aux angoisses sourdes qui nous hantent. Questions sans réponses, mais surtout sans réel lien entre elles. Distant et cérébral, voire hermétique, le scénario essaye bien de fournir quelques explications concrètes (en voix off principalement) mais n’y parvient guère. De plus, le liant entre les trois périodes de la vie de Simone semble plaqué, laissant entre l’évocation de ces portraits de femmes des trous béants que rien ne vient combler.

Travaillant autant sur les formes et les sons que sur son thème, le film jouit d’une esthétique raffinée où les verticalités de Montréal sont mises en relief dans la froideur d’un camaïeu gris et bleu. Les plans de caméra sont travaillés avec minutie, la direction artistique est irréprochable, c’est un fait. Mais au fil des minutes, le film ne cesse de s’inscrire comme un point d’interrogation, comme si le passage de témoin avec le spectateur ne pouvait jamais se faire. C’est donc surtout par son audace formelle se démarquant radicalement du traditionnel cinéma d’auteur québécois que l’on se souviendra d’Endorphine, en oubliant les frustrations causées par les tâtonnements dans l’exploration de son sujet.

Endorphine – Québec, 1h24, 2015 – Trois époques dans la vie d’une femme ayant vécu étant jeune le meurtre de se màre – Avec: Sophie Nélisse, Mylène Mackay, Lise Roy – Scénario: et Réalisation: André Turpin – Production: Luc Déry, Kim McCraw – Distribution: Les Films Christal

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