Éléphant : mémoire du cinéma québécois présente la version restaurée de L’infonie inachevée, documentaire musical produit par l’Association coopérative de productions audiovisuelles (ACPAV), tourné il y a cinquante ans par le réalisateur et producteur émérite Roger Frappier. La projection a lieu ce lundi 16 janvier à 18 h 30 à la Cinémathèque québécoise en présence du cinéaste.
Véritable phénomène culturel du début des années 70 au Québec, L’infonie était un collectif d’artistes multidisciplinaires mené par le compositeur et musicien Walter Boudreau et par le poète et chanteur Raôul Duguay. Les performances du groupe, éclatées et iconoclastes, ont marqué l’imaginaire de cette époque bouillonnante. En 1972, Roger Frappier et ses directeurs photo captent quelques performances scéniques de l’Infonie, en plus d’enregistrer un moment crucial dans l’histoire du collectif, à savoir la séparation entre Boudreau et Duguay après trois ans de collaboration active.
Captivant de bout en bout, L’infonie inachevée conserve aussi pour la postérité la rencontre de Gaston Miron et de Michèle Lalonde avec Duguay, réunis autour d’une table à dîner pour discuter de poésie, d’art et du phénomène infoniaque. On y voit entre autres Miron se met à entonner des chansons à répondre, cuillères à la main, tournoyant comme un derviche au milieu du salon de son hôte. Un moment unique, anecdotique peut-être, mais qui met bien en lumière le lien indéfectible que l’auteur de « La Bittt à Tibi » entretenait avec la culture populaire québécoise.
Au plan technique, on note que L’infonie inachevée est le premier long métrage québécois tourné en stéréophonie. Dans le communiqué de presse, Éléphant précise que lors du tournage six preneurs de son captaient chacun une source sonore différente, ce qui devait permettre de finaliser le film en stéréophonie afin de restituer au plus juste la spatialisation sonore, en fonction de ce que l’image donnait à voir. Couché sur une pellicule 35mm à quatre pistes magnétiques, L’infonie inachevée avait donc été finalisé en stéréophonie dans un laboratoire à Los Angeles, puisque les laboratoires de Montréal ne pouvaient le faire. C’était la première fois que ce procédé était utilisé au Québec.
« La version stéréophonique panoramique du film n’a été projetée qu’une seule fois au Cinéma Impérial, à l’intention de l’équipe du film, au retour de Los Angeles. C’était la seule salle à Montréal à pouvoir projeter le type de pellicule sur laquelle le son stéréo avait été appliqué », explique Roger Frappier.
À sa sortie en salle en 1974 et pour toutes les autres diffusions du film, en salle ou à la télévision, le film ne sera entendu que dans des versions sonores tronquées.
« Avec la restauration du film, qui a nécessité une fois de plus l’expertise d’un laboratoire de Los Angeles pour effectuer le repiquage de la copie 35 mm à quatre pistes magnétiques, on retrouve ainsi la stéréophonie d’origine voulue par Roger Frappier. On peut ainsi apprécier l’envergure sonore et l’expérience unique qu’apporte la stéréophonie au film, ce qui est formidable », selon Dominique Dugas, directeur d’Éléphant.
La projection du 16 janvier à la Cinémathèque québécoise est donc une belle occasion d’apprécier le film à sa juste valeur dans des conditions d’écoute optimales.