Films du Québec

Le meurtre de Georges – image extraite du film « Possible Worlds » de Robert Lepage (source capture d’écran)

Adapté d’une pièce de John Mighton, Possible Worlds (titre de la version française: Mondes possibles) est le quatrième long métrage réalisé par Robert Lepage. Il s’agit de son oeuvre la plus complexe et la plus achevée des quatre, probablement la plus négligée aussi.

Film à contenu fortement symbolique et aux intrigues enchevêtrées à l’extrême, Possible Worlds présente, en se cachant derrière une enquête policière ardue, les vies parallèles d’un homme dans la quarantaine retrouvé mort, dépouillé de son seul cerveau.

Commentaire de Robert Lepage : Mondes possibles est une histoire cubiste entre un homme et une femme. C’est un poème mathématique qui tente de saisir pourquoi l’homme est la seule espèce sur terre capable d’élaborer des projets d’avenir et d’avoir des regrets par rapport au passé.

Le point commun de ces mondes possibles est la présence de la merveilleuse Tilda Swinton, tantôt amante du défunt, mystérieuse inconnue ou voluptueuse tentatrice. Évidemment, le travail du spectateur sera d’essayer de se frayer un chemin dans ce labyrinthe de possibilités.

Basé sur une pièce de John Mighton, dramaturge et scientifique, Possible worlds propose un univers fertile en tiroirs et en histoires imbriquées. Est-ce un thriller psychologique ? Une histoire d’amour impossible ? Ou encore un essai purement esthétique? Rien et tout cela à la fois. Le film propose de nombreuses avenues de réflexion, notamment sur le thème de l’identité, récurrent chez Lepage.

Malgré les évidentes bonnes critiques et les prix remportés (Prix Génie 2000: Meilleure direction artistique ; Meilleur montage et Prix spécial du Jury à Madrid entre autres), ce troisième long métrage d’un créateur de génie ne donna rien au box-office. Moins de 800 spectateurs se déplacèrent lors de sa sortie en salles au Québec. Il eut, fort heureusement, plus de retentissement dans les pays anglophones.

La rencontre de Joyce (Tilda swinton) et Georges (Tom McCamus) – Image extraite du film Possible Worlds de Robert Lepage (capture d’écran)

Réception critique à la sortie

Il ne fait pas de doute qu’avec son caractère plutôt cérébral (sans mauvais jeu de mots), Possible Worlds possède les allures d’un véritable film canadien (dans la lignée de ceux d’Atom Egoyan et de Jeremy Podeswa) tout en ne déclassant pas, en raffinement et en virtuosité technique, la plus grande réussite de Lepage le cinéaste, Le Confessionnal. Ceux qui se reconnaissent peu dans l’imaginaire canadien-anglais et/ou n’ont guère apprécié l’épreuve du Polygraphe devront prendre un ticket pour un autre univers que celui de Possible Worlds. (André Lavoie, Le Devoir, 28 octobre 2000, p.C8)

Jeu intellectuel fascinant pour les uns, exercice par trop cérébral pour les autres, Possible Worlds est un film exigeant dont on peut certes admirer les choix esthétiques. L’ennui, c’est que la manière avec laquelle ce propos intrigant est abordé laisse singulièrement indifférent. (Marc-André Lussier, La Presse, 28 octobre 2000, p. C2)