Sans tomber dans une nostalgie stérile, revoir La sarrasine plus de quinze ans après sa sortie, c’est prendre la mesure de ce qui sépare le cinéma québécois d’hier et celui d’aujourd’hui, trop souvent sommé de répondre aux exigences d’une logique marchande de plus en plus prégnante. C’est renouer avec un cinéma de fiction fort et inspiré qui puisait aux sources de l’imaginaire et savait alors concilier l’art et la vie sans sacrifier aux recettes du spectacle. Un cinéma de fiction encore artisanal qui croyait résolument à la singularité de ses personnages et qui prenait à bras-le-corps le drame historique pour l’élever au niveau de la légende, à l’image du théâtre de marionnettes qui ouvre le film. C’est aussi se replonger dans un cinéma social qui osait penser, sans manichéisme démonstratif, les rapports de classes et les rapports minoritaires dans le Québec multiethnique au tournant du siècle dernier, alors que la société canadienne-française, encore sous le joug de l’Église catholique, faisait face à une immigration qui venait enrichir, mais aussi modifier en profondeur, son profil ethnoculturel. C’est enfin redécouvrir un cinéma qui, avec un souci d’authenticité des plus convaincants, entendait faire oeuvre de mémoire en nous livrant un regard intérieur sur la communauté italo-montréalaise de l’époque.
Gérard Grugeau, 24 images, n° 138, 2008, p. 28. – http://id.erudit.org/iderudit/21430ac
Les films de la semaine
- La sarrasine (***) – Au début du siècle à Montréal, un tailleur d’origine italienne est injustement accusé du meurtre d’un canadien français – Drame historique de Paul Tana (1991) avec Enrica Maria Modugno, Tony Nardi, Jean Lapointe – ARTV, jeudi 13 juin à 13h04 et vendredi 14 à 1h34
- Le Neg’ (****) – Après qu’une statue ait été brisée sur le terrain d’une vieille dame, les résidents du coin s’en prennent à un jeune noir qu’ils accusent du méfait. Après la mort de celui-ci, la police entend les différentes versions des témoins – Drame de Robert Morin (2000) avec Emmanuel Bilodeau, Robin Aubert et Iannicko N’Doua-Légaré – CinéPop, jeudi 13 juin à 18h25 et vendredi 14 à 2h15 et 12h30
- Cheech (*½) – Le propriétaire d’une agence d’escorte livre une lutte à finir avec l’un des ses concurrents – Comédie dramatique de Patrice Sauvé (2006) avec François Létourneau, Patrice Robitaille, Anick Lemay et Fanny Mallette – Radio-Canada, vendredi 14 juin à 0h30 (jeudi minuit trente)
- The Kiss (Le baiser) (*½) – Des événements tragiques ont tôt fait de convaincre une adolescente que sa tante exerce des pouvoirs maléfiques sur son entourage. – Drame d’horreur de Pen Densham (1988) avec Joanna Pacula, Meredith Salenger et Pamela Collyer – Prise 2, vendredi 14 juin à 23h et dimanche 16 juin à 2h
Diffusions de nuit: un film annoncé à 1h30 du matin dans la nuit du samedi au dimanche est classé ici à dimanche et non à samedi.