[Critique] Vic+Flo ont vu un ours: un bois qui réchauffe

Sorte de suite tragique à Carcasses ou à Les lignes ennemies, Vic + Flo ont vu un ours ne renie pas ses origines et ne détonne aucunement dans la cinématographie du cinéaste québécois le plus novateur de ces dernières années.

Romane Bohringer dans le film Vic+Flo ont vu un ours (Denis Côté, 2013 - FunFilm)

Romane Bohringer dans le film Vic+Flo ont vu un ours (Denis Côté, 2013 – FunFilm)

Perdues dans les bois, essayant de se refaire une petite place bien à elles, la Vic et la Flo vivent à l’écart dans un monde bien à elles, tentant de revivre après plusieurs années de réclusion. Mais l’amour n’est pas chose aisée, Flo hésite à entrer dans la cage verdoyante – autre sorte de réclusion – proposée par Vic qui voudrait bien un peu de stabilité. Et il faut aussi faire avec les vieilles histoires, qui refont immanquablement surface et qui finissent par nous rebondir en pleine gueule.

Après avoir introduit un univers étrange et reclus, sorte d’entre deux entre prison et liberté, le scénario prend de la vigueur alors que le personnage de Flo (Bohringer) fait son entrée en scène. Jusque là assez sobre et contemplatif, la prémisse de Vic+Flo ont vu un ours porte bien le qualificatif de minimaliste. Côté nous invite à rencontrer ses personnages, sans que rien ne transpire de leur présent ou de leur passé. En dehors de l’agent de probation (Grondin), personnage somme toute très secondaire qui nous raccroche à la vie concrète, ni Vic ni Flo ne sont expliquées, trop occupées à vivre l’instant présent au calme illusoire. Un calme durant lequel les deux femmes tenteront de vivre leur histoire d’amour, offrant ainsi au film une sensibilité assez rare chez Côté, du moins dans ses plus récentes Å“uvres.

Cette histoire de passion impossible et dramatique donne l’opportunité à Côté d’approfondir ses personnages plus qu’à l’habitude. Ils nous semblent plus humains, moins désincarnés. Toutefois, cela ne rend pas le film plus chaud ou plus accessible pour autant. Car la force du cinéma de Côté est de nous faire entrer dans un monde dont la réalité pourtant coutumière baigne dans une marginalité qui étonne sans cesse. Ce monde dans lequel évoluent Vic et Flo, mais aussi Emmanuel Bilodeau (Curling), Jean-Paul Colmor (Carcasses) ou les gardiens du parc Safari (Bestiaire). Côté, le cinéaste des films dont la réalité nous glisse des mains.

Même si l’on peut lui reprocher d’être moins fluide que l’impeccable Curling, Vic+Flo ont vu un ours est certainement un épisode marquant dans l’oeuvre d’un cinéaste qui assume pleinement ses choix. Une posture résolument hors standards, quitte à perdre quelques plumes auprès du public, mais qui lui permet de bâtir une cinématographie essentielle. Un corpus dont la liberté créative s’affirme de film en film et justifie entièrement la volonté de son auteur de rester en marge d’une profession qui a finalement assez peu de liens avec son cinéma.

Vic+Flo ont vu un ours – Québec, 2013, 1h36 – Deux ex-taulardes tentent de vivre leur passion amoureuse recluses dans un boisé. Un agent de probation et une étrange voisine les surveillent de près – Avec: Pierrette Robitaille, Romane Bohringer, Marc-Andre Grondin, Marie Brassard – Scénario et réalisation: Denis Côté – Production: Stéphanie Morissette, Sylvain Corbeil, Nancy Grant – Distribution: FunFilm Distribution

Ma note: 

Les notes :

★★★★★ Excellent
★★★★ Très bon
★★★ Bon
★★ Moyen
Mauvais

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