Ni documentaire, ni fiction, ce projet expérimental représente en effet une suite logique dans l’exploration d’univers visuels et sonores entrepris par Côté depuis Les états nordiques (2004).
Que ta joie demeure est une exploration libre des habitudes que l’on retrouve sur nos lieux de travail. Filmé dans plusieurs entreprises de la grande région de Montréal, le film s’ingénie à mélanger le réel (les lieux, les objets) et l’irréel (les gestes et les mots de ceux qui les utilisent) pour mieux questionner nos rituels professionnels, dont personne ne sait au juste où et comment ils nous dirigent.
Regard d’un cinéaste libre sur un milieu inconnu, le film n’est pas exempt de fantaisie absurde (une autre constante chez Côté) dont découle une certaine légèreté dans des milieux qui n’en contiennent que peu. Une autre façon d’aborder le travail.
Présenté en première mondiale au festival de Berlin début février et en première canadienne aux Rendez-vous du cinéma Québécois, le film a remporté la Mention spéciale du jury au FICUNAM de Mexico.
Mot de l’auteur
Parlez-nous de ce qui a inspiré cette idée… Le résultat final ressemble-t-il à ce qui avait été imaginé?
J’ai toujours trouvé difficile de m’assumer comme artiste. Je me suis souvent demandé s’il y a un travail plus noble qu’un autre; s’il existe une sorte de hiérarchie abstraite du travail. Qu’est-ce qui officialise qu’une journée a été bien remplie par un travail concret? Ce sont des questions un peu tourmentées et inutiles mais j’ai voulu partir à la chasse à une certaine définition du travail. Évidemment je ne l’ai pas trouvé. Ensuite, je me suis laissé hanter par cette idée terrible que nous devons tous travailler pour à la fin, trouver une sérénité, un repos, un sentiment d’accomplissement. Ce sont des questionnements abstraits auxquels pouvait ne répondre qu’un film assez abstrait. Au départ, j’ai voulu filmer l’effort, la beauté du geste, le mouvement du travail; ceux qui s’oublient dans le travail, ceux qui y sont heureux, ceux qui n’y pensent pas. Je savais que ça donnerait une allégorie. Je savais que le dispositif éclaterait aussi en chemin et que j’incluerais un peu de ruse, des passages confectionnés/fabriqués, des acteurs. Il n’y a jamais eu d’intention d’équilibrer les choses. Il fallait du chaos; quelque chose de très ouvert.
Je me suis laissé hanter par cette idée terrible que nous devons tous travailler pour à la fin, trouver une sérénité, un repos, un sentiment d’accomplissement
Vous rejetez le cinéma de sujet et vous posez un regard abstrait sur le monde du travail. On ne peut pas dire que c’est un documentaire. Que doit-on prendre de cette allégorie ou comment doit-on affronter ou déterrer le message du projet s’il y en a un?
Il est certain que ce film-essai s’inscrit dans la continuité de mes films plus artisanaux, ceux qui cherchent quelque chose d’introuvable (Carcasses, Bestiaire), qui questionnent le langage. Je prends un très grand plaisir à créer des films qui ne se donnent pas facilement à moi, ni au spectateur. Ils doivent exister, longtemps, circuler. Il faut mettre des mots sur ces expériences image-son. J’espère que le spectateur ne se cassera pas la tête. J’espère qu’il regardera le travail en marche, une réflexion en marche, une recherche en marche. Il y a un peu d’humour, quelque chose d’un peu hypnotique, des moments de distanciation mais il n’y a pas de réel enjeu ni issue à ce film. J’aime bien quand je regarde un film arriver à un moment où je sais que je suis en train de regarder un film. Peut-être que je ne le comprends, pas mais je le tourne de tous les côtés pour voir comment on a bien pu le faire, le penser et le laisser exister.
Source : dossier de presse du film
Résumé
D’un ouvrier à l’autre, d’une machine à la prochaine; de ces mains, ces visages, ces pauses, ces efforts, que peut-on établir comme dialogue absurde et abstrait entre L’Homme et son besoin de travailler? Que valent ces instants où l’homme multiplie et répète des gestes qui devraient logiquement le mener vers un repos dont la qualité reste impossible à définir?
Synopsis officiel
Distribution
Guillaume Tremblay ; Emilie Sigouin ; Hamidou Savadogo ; Ted Pluviose ; Cassandre Emmanuel ; Olivier Aubin, Ted Pluviose
Fiche technique
Genre: film expérimental - Origine: Québec, 2014 - Durée: 1h10 - Langue V.O.: français - Date de sortie: 4 avril 2014 sur un écran à Montréal - Visa: Général
Une présentation Metafilms - Scénario, production, réalisation : Denis Côté - Production : Sylvain Corbeil, Nancy Grant - Coordination de production : Audrey-Ann Dupuis-Pierre - Distribution : EyeSteelFilm
Équipe technique - Image : Jessica Lee Gagné - Son : Frédéric Cloutier, Clovis Gouaillier - Montage : Nicolas Roy - Supervision technique : Annie Presseault, Vision Globale