Films du Québec

Biopic classique, Louis Cyr – L’homme le plus fort du monde offre un rôle en or pour Antoine Bertrand en héros indéfectible et fait briller la patine vintage de sa direction artistique. La réalisation, un tantinet frileuse, étreint à pleins biceps le style de la biographie officielle, consensuelle sur tous les plans et qui ne souffre d’aucun reproche majeur. Le héro est local, il est quasiment parfait, sa vie est admirable et ses exploits inégalés.

À partir d’un tel sujet, non dénué de risques cependant, les auteurs ont réussi le pari de nous faire partager les exploits de cet homme si connu mais en même temps si peu connu. Le scénario nous épargne une bonne part des moments mélodramatiques habituels. Une retenue visible dans les relations très sobres entre Cyr et sa femme, ou dans la scène particulièrement significative qui nous montre Cyr en train de joueur un rigodon guilleret pour sa sœur en fin de vie.

Le vrai Louis Cyr était sans doute un  personnage plus complexe qu’il n’y paraît. Les auteurs ont donc privilégié le portrait intime du héros au lieu de la saga grandiloquente. Même devenu homme d’affaires riche et respecté, Cyr gardera l’honnêteté, la bravoure, et la certitude de son invincibilité, jusqu’à ses derniers jours. Un portrait à la limite de l’angélisme et de la perfection, mais pouvait-on vraiment faire autrement? Toutefois, ce portrait riche et complexe se fait au détriment de certains autres personnages, étudiés très sommairement, comme celui d’Horace Barré qui ne joue qu’un rôle mineur dans l’intrigue, malgré son statut de bras droit de Cyr.

Malgré tout, les nombreux tours de force, filmés sous toutes les coutures, n’épargnent pas le film de plusieurs longueurs, en raison sans doute d’une entrée très progressive dans le vif du sujet et de nombreux passages transitoires qui freinent le rythme.

Sur le plan technique, force est de constater que les aspects sont parfaitement maîtrisés, en particuliers les décors, la direction artistique et les costumes. Les effets visuels sont particulièrement soignés et l’on ne ressent à aucun moment l’impact néfaste d’un budget somme toute limité pour ce genre de productions.

Louis Cyr – l’homme le plus fort du monde constitue donc une biographie de belle facture dans la vie méconnue de cette légende populaire. À mi chemin entre le tiède Gerry d’Alain Desrochers et l’inoubliable Maurice Richard de Charles Binamé, qui reste la référence en matière de biopic historique.