L’acteur canadien Donald Sutherland est décédé jeudi 20 juin à l’âge de 88 ans, laissant derrière lui un nombre impressionnant de performances de haut niveau et de souvenirs impérissables. Né à Saint-Jean, au Nouveau-Brunswick, en 1935, Donald Sutherland a eu une carrière remarquable au cinéma et à la télévision, enfilant comme des perles près de 200 apparitions au fil de ses cinquante ans de présence à l’écran, sous la houlettes de techniciens méconnus, mais aussi dans l’oeil des caméras de grands cinéastes.
Après avoir étudié l’art dramatique, le génie et l’anglais à l’Université de Toronto, il intègre la London Academy of Music and Dramatic Art en Angleterre. Il joue avec le Perth Repertory Theatre en Écosse et à Londres avant de passer au cinéma. On le voit dans son premier grand rôle en 1967, aux côtés de Jim Brown, Charles Bronson, John Cassavetes, et Lee Marvin dans The Dirty Dozen (Robert Aldrich). Mais c’est son incarnation inoubliable du chirurgien Hawkeye Pierce dans la version cinématographique de MASH de Robert Altman qui lance réellement la carrière de cet échalas sympathique, alors âgé de 25 ans.
Les rôles marquants ne tarderont pas à suivre, et ce, dans tous les genres et dans tous les styles. Sutherland étant à mes yeux l’un des comédiens les plus versatiles qui soit. Le sergent Oddball de Kelly’s Heroes (Brian G. Hutton, 1970), le détective Klute dans le polar essentiel Klute (Alan J. Pakula, 1971), Homer, le pauvre type de la satire jouissive The Day of the Locust (John Schlesinger, 1975), ou encore le Casanova de Fellini (Federico Fellini, 1976) font partie de ses faits d’arme.
Et je pourrais ajouter à cette liste quelques autres visages mémorables livrés dans Don’t Look Now (Nicolas Roeg, 1973), Invasion of the Body Snatchers (Philip Kaufman, 1978), Ordinary People (Robert Redford, 1980), Eye of the Needle (Richard Marquand, 1981), JFK (Oliver Stone, 1991) ou encore la franchise The Hunger Games.
Grand fan des Expos de Montréal, Donald Sutherland entretenait des liens très étroits avec le Québec, où il avait une maison dans les Cantons-de-l’Est. Il a donc participé à quelques productions locales, essentiellement anglophones. Je me souviens de son portrait habité du célèbre Norman Béthune dans le biopic injustement oublié Bethune – The Making of a Hero (Philip Borsos, 1990). Un personnage qui lui convenait à merveille, et qu’il a du reste incarné à deux reprises ; la première étant dans un téléfilm d’Eric Till de 1977.
Je reste marqué par sa prestation incandescente d’un prêtre ravagé par un feu intérieur dans le remarquable drame passionnel The Act of the Heart (Paul Almond, 1970) et de son incarnation placide d’un membre de la police montée canadienne dans Alien Thunder (Claude Fournier, 1970), le seul vrai western québécois jamais produit. À lui seul, il avait réussi à rendre intéressant le polar mineur The Disappearance (Stuart Cooper, 1977) dans lequel on le voyait déambuler dans Habitat 67.
Malgré tout ça, Donald Sutherland n’a jamais été mis en nomination pour un Oscar. Devant cette impensable injustice, l’académie s’est rattrapée en 2017 en lui remettant une statuette honorifique, très justement méritée. Il a également reçu un prix Emmy et deux Golden Globes et a été fait officier de l’Ordre du Canada, où il a remporté un Génie et un Prix du Gouverneur général pour les arts du spectacle.
