La vie ordinaire de montréalais peu argentés cherchant l’amour, la réclusion de marginaux retirés en forêt cherchant un sens à leur désÅ“uvrement, la jeunesse des années 60 clamant sa liberté et les troubles de la crise d’Octobre, voilà les sujets abordés dans ce panorama hebdomadaire de notre cher cinéma québécois. Quatre films sélectionnés pour vous pour quarante ans de « vues animées ».
Bonne semaine de cinéma québécois!
Lundi
Le soleil se lève en retard
✰✰✰ – Timide et renfermée, Gisèle décide enfin de se forcer à trouver l’amour. Pendant qu’elle noue une relation avec un jeune homme qui lui ressemble, sa soeur Marguerite vit un drame horrible… – Chronique d’André Brassard (1976) avec Rita Lafontaine, Yvon Deschamps et Denise Filiatrault – TFO, lun. 18 jan. à 21h
Yvon Deschamps m’a surpris. Il prouve qu’il est possible que sa vocation ne soit pas seulement celle d’un amuseur qui trace parfois un portrait au vitriol de ses concitoyens, mais aussi celle d’un comédien sensible et intelligent, parce que finement dirigé (nous sommes loin, Dieu merci, des pitreries de Denis Héroux). Les séquences de l’éveil des sentiments entre Gisèle et Jean sont, à cet égard, parmi les meilleures du film. – Patrick Schupp, Séquences : La revue de cinéma, n° 88, 1977, p. 33-35.
Samedi
WOW
✰✰✰✰ – DOC – Nous sommes à la fin des années 60 et Claude Jutra, alors en pleine révolte, interroge la jeunesse québécoise. Les confessions se font en toute liberté, au grand dam des tabous et des interdits de l’époque. Une oeuvre débridée qui reste encore un modèle du genre, à voir sans faute. – AMI Télé, sam. 23 jan. à 20h et dim. 24 à 15h (AVEC VIDÉODESCRIPTION)
Voir la bande annonce sur le site de l’ONF – Le film est également disponible en ligne.
Elle veut le chaos
✰✰✰ – Une jeune femme troublée s’isole dans un endroit reculé, mais doit faire avec des personnages troublants qui l’empêchent de retrouver la sérénité – Drame psychologique de Denis Côté (2008) avec Ève Duranceau, Normand Lévesque et Laurent Lucas – TFO, sam. 23 jan. à 21h
Pour peu qu’on reste ouvert à l’expérience qu’il propose, l’univers qui se déploie progressivement sous nos yeux devient vite fascinant, non seulement parce que le travail de mise en scène y est remarquable, mais peut-être surtout parce qu’on s’y sent porté par un regard insolite et percutant, lancé sur une piste qu’on aura vite le goût de suivre malgré les embûches – mais aussi grâce à elles ! – semées çà et là par le réalisateur. – Pierre Barrette, 24 images, n° 140, 2008-2009, p. 53.
Dimanche
Nô
✰✰✰ – Une jeune actrice en tournée au Japon est loin de se douter que son chum est en plein dans la tourmente de la crise d’octobre – Comédie dramatique de Robert Lepage (1998) avec Anne-Marie Cadieux et Alexis Martin – Unis, dim. 24 jan. à 21h et mar. 26 jan. à 1h et 13h et ven 29 jan. à 10h
Le film évoque l’année 1970, qui me touche parce qu’il s’agit d’une année de transition, de bouleversements, d’éclats. Il parle de Montréal qui s’est mise au monde en 1967 grâce à l’exposition universelle, puis s’est refermée, et il joue sur ce que c’était être un homme, être une femme en 1970. La culture québécoise est faite notamment de films français et de films américains mal traduits où les hommes sont des leaders, des héros qui s’expriment. Au Québec toutefois, les hommes sont silencieux. Ce sont les femmes qui provoquent les changements, qui bâtissent la société. Le Québec est une société matriarcale qui s’aligne sur les règles patriarcales internationales, de sorte qu’on a mis du temps à y reconnaître l’équité. Nous avons hérité de la tradition amérindienne où la grand-mère et le conseil des femmes ont le pouvoir absolu, un pouvoir magique, parce que les Français avaient développé une relation privilégiée avec les Amérindiens. À tel point qu’on avait dû passer une loi pour leur interdire de s’habiller, de se maquiller et de porter des boucles d’oreille comme les Amérindiens. Avec Nô je me suis intéressé à cet héritage, tel qu’il m’apparaissait en 1970, alors que les hommes voulaient changer le monde et les femmes se réapproprier leur corps. – Michel Coulombe, entretien avec Robert Lepage, Ciné-Bulles, vol. 17, n° 2, 1998, p. 6-10.