Programme des fêtes oblige, ce ne sont pas trois mais quatre suggestions télé que je vous livre pour cette semaine. À tout seigneur tout honneur : Mon oncle Antoine, le classique des classiques de Claude Jutra qui fait une apparition remarquée sur AMI Télé avec description pour malentendants. Marquant, inoubliable, essentiel, les qualificatifs ne manquent pas pour décrire cette chronique d’un temps révolu qui fit entrer son réalisateur dans la légende du cinéma québécois.
TFO continue son cycle Gilles Carle, avec la diffusion lundi soir de La mort d’un bûcheron, tandis que sur CinéPop vous pourrez suivre le difficile passage à l’âge adulte d’un jeune des quartiers défavorisés de Montréal dans Le ring relaté avec sensibilité par Renée Beaulieu et Anaïs Barbeau-Lavalette.
À ne pas manquer non plus, Curling de Denis Côté (sans doute son meilleur film à ce jour) diffusé sur The Movie Network Encore, chaîne câblée anglophone du groupe Bell Média, sur laquelle vous pourrez aussi revoir le très beau Roméo Onze d’Ivan Grbovic.
De son côté, Télé-Québec nous repasse une énième rediffusion des inusables Dans une galaxie près de chez vous (1 et 2), de la populiste comédie Les 3 p’tits cochons, et du célèbre mais démodé Louis 19, roi des ondes de Michel Poulette, important succès public à sa sortie il y a un peu plus de 20 ans.
Bonne semaine de cinéma québécois !
Lundi
La mort d’un bûcheron
✰✰✰✰✰ – Une jeune provinciale arrive à Montréal à la recherche de son père. Elle fait escale dans une boîte de strip-tease – Comédie dramatique de Gille Carle (1972) avec Marcel Sabourin, Carole Laure, Daniel Pilon – TFO, lun. 14 déc. à 21h
Chose certaine, avec Gilles Carie on ne s’ennuie pas. On ne passe pas la moitié d’un film à se demander quand l’action va démarrer. Avant même le générique, l’action vous gicle en pleine figure. Juste le temps de ramasser quelques plans habilement orchestrés, et vous assistez à la mort d’un bûcheron dont on ne tarde pas à débiter le cadavre encore chaud à l’aide d’une scie mécanique. Sous l’Å“il impassible d’une caméra sans peur et sans frissons. Les frissons ? C’est pour les gens dans la salle. – Janick Beaulieu, in Séquences : La revue de cinéma, n° 72, 1973, p. 25 à 27
Mercredi
Curling
✰✰✰✰✰ – Un modeste employé de bowling empêche sa fille adolescente d’affronter la société, tandis qu’à l’extérieur de la maison, de bien étranges choses se passent – Comédie dramatique de Denis Côté (2010) avec Emmanuel Bilodeau, Philomène Bolodeau et Sophie Desmarais – The Movie Network Encore 2, mer. 16 déc. à 11h15 et 20h40
Plongez dans l’univers irréel et anachronique de Denis Côté, dans ce film d’une beauté mystérieuse hors du commun. Laissez-vous envoûter par Philomène Bilodeau et ses cadavres gelés ; regardez droit dans les yeux ce tigre couché ; pestez avec Emmanuel Bilodeau sur sa van débraillée et riez aussi avec un Roc Lafortune, inoubliable en patron quétaine d’un bowling suranné. Car Curling, c’est avant tout un univers unique, réel et irréel à la fois, un Québec bien vivant et pourtant si étrange. Notre Québec.
Jeudi
Le ring
✰✰✰½ – Jessy, un jeune garçon laissé à lui-même, cultive le rêve de devenir lutteur pour tenter d’échapper à sa triste vie – Drame social d’Anaïs Barbeau-Lavalette (2007) avec Maxime Desjardins-Tremblay, Julianne Côté et Jason Roy Léveillée – CinéPop, jeu. 17 déc. à 17h55 et ven. 18 à 6h
Anaïs Barbeau-Lavalette, qui porte à l’écran un scénario écrit par Renée Beaulieu, fait écho à la force intérieure d’un petit homme dont on devine qu’il prendra très bientôt son destin en main. Bien qu’elle jette un regard compatissant envers ses personnages, la réalisatrice ne force jamais le trait. Elle n’enjolive pas non plus son tableau au profit d’un sentimentalisme condescendant. L’émotion n’est ainsi jamais offerte en spectacle, naissant plutôt d’un courant d’empathie qui, forcément, s’installe peu à peu. – Marc-André Lussier in La Presse, samedi 27 octobre 2007, p. 10
Vendredi
Mon oncle Antoine
✰✰✰✰✰ – Les habitants d’une petite communauté se réunissent au magasin général la veille de Noël. Le gérant de l’endroit, l’oncle Antoine, avec son humour et ses gorgées de gin, anime les lieux sous l’Å“il intéressé de son neveu Benoît qui est orphelin et qui vit chez son oncle – Comédie dramatique de Claude Jutra (1971) avec Jean Duceppe, Jacques Gagnon et Olivette Thibault – AMI Télé, ven. 18 déc. à 9h et minuit et sam. 19 à 15h
Presque tout le monde a vu et goûté Mon oncle Antoine. On y a admiré la qualité de l’image, la finesse de la mise en scène et le jeu du jeune Gagnon découvrant tout simplement, sans mélodrame, l’amitié, les seins de sa petite amie, la femme, la solitude, la mort, l’hypocrisie et le manque de «pureté» du monde adulte. Claude Jutra a su condenser ces expériences en une seule journée (ou presque) et rester dans les limites du vraisemblable. D’où la grande séduction de son film. – Yves Lever : Intéressant ou kétaine, le cinéma quebécois est bien vivant